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Festival de Marseille

Entretien avec Olivier Dubois

 

Pourquoi une création sur le mahraganat ?


Tout d’abord, il est important de dire que je vis entre Paris et Le Caire depuis de nombreuses années ; et j’ai vu apparaître ce courant musical, sa déferlante sur le monde musical égyptien. Les égyptien.ne.s chantent et dansent partout, de manière discrète et intime mais cela fait partie intégrante de la culture égyptienne. Et là, j’ai observé avec beaucoup de curiosité le développement d’une musique et d’une danse plus sauvages, plus instinctives. Elle est d’apparence moins savante, totalement saturée, comme si chaque espace, instant devait être rempli, comme si le temps était compté. Elle porte l’audace de la jeunesse. Il m’a fallu des années pour oser l’explorer. Pour que cette nouvelle voix trouve d’abord une maturité et comme si, étranger, je n’avais pas encore le droit d’y toucher, pas encore le droit de la détourner de sa raison d’être. Aujourd’hui, je m’y attèle avec tout autant de respect et d’ignorance mais avec la conviction qu’elle est contemporaine, qu’elle porte en soi une parole nouvelle. Un cri.

 


« Itmahrag », qu’est-ce que cela signifie ?


Itmahrag est un néologisme que j’ai inventé. D’un mot Mahraganat, j’en ai conjugué un verbe qui n’existe pas : « Festoyons ». Itmahrag est comme une injonction à danser, à chanter. J’aime beaucoup l’idée que tout ceci ne soit qu’une invitation à en être, à célébrer. Une célébration comme un enchantement.

 


Itmahrag ce n’est donc pas seulement la création d’un spectacle, quel est son processus, sa temporalité, comment avez- vous pensé sa mise en œuvre, entre l’Égypte et la France ?


Itmahrag est une aventure au long cours qui réunit des jeunes musiciens et danseurs, non professionnels, une jeune structure locale B’sarya for Arts installée à Alexandrie et la Compagnie Olivier Dubois (COD). La création du projet aura pris plus d’une année, car l’enjeu premier est de proposer Itmahrag comme une production qui accompagne durablement tous les partenaires. L’association de nos deux équipes, B’sarya en Égypte et COD en France, nous a contraint à inventer un modèle de création et de production hybride qui puisse répondre aux réalités économiques, sociales et humaines de nos deux structures. Ce nouveau langage permet ainsi à chacune des équipes de mettre à profit ses savoirs et de développer de nouveaux modes de travail adaptés aux besoins de la création.


Un challenge sans aucun doute, mais qui, à mon sens, ne pouvait se faire autrement. Ce projet en commun nous permet de grandir comme artistes et comme structures. Et ne pas seulement être un faiseur de rêves qui ne dure qu’une nuit !

 


Qui sont les interprètes avec qui vous travaillez, et comment s’articule votre travail eux et avec François Caffenne ?


L’équipe artistique est composée de 7 interprètes, 3 musiciens et 4 danseurs. Dans sa grande majorité, ces jeunes interprètes n’ont reçu que très peu voire aucune formation. Ils sont totalement autodidactes, tout comme François Caffenne et moi- même d’ailleurs ! Pour la musique, la situation sanitaire nous a contraint à commencer par des séances de travail à distance. Et c’est là, la force des autodidactes : autonomie, audace et débrouillardise. Très vite, nous avons réussi à collaborer d’une nouvelle manière. L’articulation de la création est restée la même. Recherche et premières ébauches. Puis nous avons tout déstructuré, déplacé pour nous perdre. Car je le crois, l’essentiel est que nous puissions nous perdre en espérant y trouver un trésor !!

 


Le syndicat des musiciens égyptiens a annoncé qu’il voulait interdire le mahraganat, qu’est-ce que cela reflète ?
 

Le Mahraganat, comme tout nouveau mouvement artistique provoque un certain mépris des plus établis. Cette musique vient tout récemment d’être interdite en Égypte. Je suis artiste et ne porte donc aucun message politique. Je ne commente en rien des faits de sociétés. J’essaie simplement de répondre à mes envies, mes troubles, et de là, tenter de créer des sensations. Ces sensations, qui j’en sûr, permettent à chacun de ressentir sa propre perception du monde. Aujourd’hui, je sais seulement que j’aime écouter, voir cette jeunesse produire son avenir. Et j’aime l’idée de m’en approcher, car c’est ici que l’on parle de demain.

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